Policiers brûlés à Viry-Châtillon : trois condamnés se pourvoient en cassation
Publié : 22 avril 2021 à 8h15 par Iris Mazzacurati
Les trois hommes condamnés à 18 ans de prison pour avoir attaqué et brûlé des policiers à Viry-Châtillon en 2016, se sont pourvus en cassation.
Au terme de six semaines de procès à huis clos, la cour d'assises des mineurs de Paris a déclaré dimanche 18 avril, cinq des 13 accusés coupables de tentative de meurtre sur des policiers. Trois d'entre eux, qui avaient été condamnés à 18 ans de réclusion, se sont pourvus en cassation.
Ce verdict a été dénoncé comme trop clément par les syndicats de policiers, les avocats des victimes et de nombreux responsables politiques, même si la défense proteste contre la probité de l'enquête.
"C'est une erreur judiciaire, on a mis des innocents en prison car il fallait des noms à tout prix", regrette Me Sarah Mauger-Poliak, avocate d'un jeune acquitté à deux reprises. Selon la défense, les interrogatoires auraient été mal retranscrits, à la défaveur des accusés.
Ces critiques ont fait réagir le directeur général de la police nationale Frédéric Veaux qui a pris la défense des enquêteurs : "Je les soutiens de toutes mes forces quoi qu'il arrive et quoi qu'on dise. Je les défends et je les défendrai", a-t-il déclaré mercredi à l'AFP.
Plusieurs avocats affirment qu'un témoin central, qui était mis en cause au début de l'enquête, a expliqué à la barre, lors du procès en appel à huis clos, qu'il souffrait d'une addiction à la codéine et que lors de sa garde à vue, il était "en manque" et avait eu une "crise de panique".
Cet élément ne figurait pas dans le dossier, selon les avocats de la défense. A la barre, le témoin aurait reconnu avoir "dit de la merde pour se sortir de la merde".
"Sur le procès-verbal, on a l'impression que le témoin désigne mon client de manière directe. Mais sur la vidéo (de la garde à vue à laquelle les avocats ont eu accès, ndlr), on voit qu'il ne fait qu'acquiescer aux questions des policiers", explique Me Simonard, conseil d'un jeune deux fois acquitté.
"Mon client a fait 34 mois de détention provisoire sur la base d'une enquête déloyale. En première instance, le parquet avait même requis 30 ans contre lui", ajoute-t-il.
Les enquêteurs "ne cherchaient pas les coupables mais des coupables".
Me Frédérick Petipermon, avocat d'un des accusés qui se pourvoit en cassation, a indiqué à l'AFP avoir déposé une plainte contre les enquêteurs pour "faux et usage de faux". Contacté, le parquet d'Evry a précisé n'avoir pas encore reçu la plainte.
D'autres avocates, Sarah Mauger-Poliak et Yaël Scemama, ont également exprimé leur intention d'attaquer les enquêteurs en justice : "Les policiers ont transmis 15 pages d'audition de mon client aux magistrats quand ils auraient dû en transmettre 245", affirme Me Mauger-Poliak à l'AFP, confirmant des informations révélées mercredi par Mediapart.
"Ses propos, où ils mettaient formellement hors de cause un autre acquitté, ont disparu", appuie-t-elle.
"Ce sont des juges d'instruction qui détenaient l'ensemble du dossier et de tous les éléments d'enquête, y compris les enregistrements des auditions, qui ont décidé du renvoi des accusés devant une cour d'assises", a réagi auprès de l'AFP Me Laurent-Franck Lienard, avocat de deux des victimes.
Un des jeunes acquittés dimanche a déclaré à Mediapart que les enquêteurs "ne cherchaient pas les coupables mais des coupables".
Des propos erronés
A l'inverse, une partie de la classe politique a dénoncé un verdict léger et des propos prêtés à l'avocat général qui avait requis 12 peines allant de 12 à 25 ans de réclusion et un acquittement.
Dans un entretien au Figaro dimanche, Me Thibault de Montbrial, avocat d'une victime, avait assuré que l'avocat général avait dit aux accusés "qu'ils constituaient à ses yeux "une richesse pour le pays"".
Une déclaration qui a suscité de nombreux commentaires à droite et à l'extrême droite. La procureure générale de Paris Catherine Champrenault a regretté mercredi la diffusion de "propos erronés".
"La déformation publique, parcellaire et trompeuse, des propos d'un magistrat, par des personnes manifestement animées d'une intention de nuire et dont certains n'ont pas assisté aux débats, constitue une nouvelle tentative de déstabilisation de l'institution judiciaire", a-t-elle dénoncé dans un communiqué.
(Avec AFP)