Gifle à Macron : quatre mois ferme pour Damien Tarel
Publié : 11 juin 2021 à 7h39 par Iris Mazzacurati
L'homme qui a giflé Emmanuel Macron, a été condamné jeudi 10 juin à Valence, à 18 mois de prison - dont 14 avec sursis - et aussitôt incarcéré.
Les réquisitions du parquet n’ont été que partiellement suivies. Il demandait 18 mois ferme et un mandat de dépôt contre Damien Tarel, 28 ans, qui a reconnu avoir, deux jours plus tôt, giflé le président de la République lors d'un déplacement dans la Drôme.
Jusque-là inconnu des services de la Justice, D. Tarel a aussi été condamné à une obligation de travail ou de formation et à une interdiction de port d'armes pendant cinq ans. Cette gifle, "parfaitement inadmissible" est un "acte de violence délibérée", a soutenu le procureur de la République Alex Perrin face au mis en cause, cheveux longs, t-shirt vert et lunettes sur le nez, qui était jugé en comparution immédiate.
Ce dernier pouvait demander un renvoi du procès pour mieux préparer sa défense, mais a demandé à être jugé "immédiatement".
M. Perrin s'est inquiété d'un possible risque de récidive, disant percevoir "une sorte de détermination froide" chez ce résident de la petite ville de Saint-Vallier.
Damien Tarel a admis lors de l'audience avoir frappé le président, d'un geste "impulsif". "Je ne l'apprécie pas et quand il s'est dirigé directement vers moi, dans un premier temps, ça m'a surpris", a raconté celui qui s'est dit "investi par les "gilets jaunes" dont la voix n'est plus entendue".
Avant de se l'expliquer. "C'est sa campagne : il essaie de cibler la jeunesse française".
"Quand j'ai vu son regard sympathique et menteur", j'ai compris, a-t-il rapporté, qu'il "voulait faire de moi un potentiel électeur".
La présidente du tribunal s'est étonnée de ce geste, alors que le mis en cause se dit féru d'arts martiaux. "En quoi votre réaction de mardi est-elle conforme à ces principes, à la chevalerie, à la maîtrise que vous enseignent les arts martiaux ?"
"Si on reste dans la réalité, j'ai juste giflé Emmanuel Macron car un sentiment d'injustice m'a parcouru. Cela n'a rien à voir avec la chevalerie ou mes activités personnelles", lui a-t-il répondu.
Damien Tarel a reconnu son ancrage à la droite du spectre politique, assurant que son cri "Montjoie Saint-Denis" prononcé avant sa gifle "fait référence au cri de ralliement historique des chevaliers français. C'est aussi un slogan patriote", a-t-il dit devant le tribunal de Valence.
Une justice "pour l’exemple" ?
Sans emploi et vivant du RSA, le mis en cause a reconnu des difficultés scolaires dues à sa dyslexie, un bac passé en deux fois, une formation en thanatopraxie interrompue avant le diplôme national. Depuis la mort de son père, il y a deux ans, il n'a plus retravaillé.
Pour revivifier "sa petite ville de campagne mourante", il a monté trois associations : un club d'arts martiaux médiévaux, une association de jeux et un festival de manga. Et lisait beaucoup sur le Moyen-Age.
Dans sa plaidoirie, son avocate Elodie Guellier s'est émue du rôle de la presse - "ça fait 48 heures que l'entourage vit un enfer" - et a demandé au tribunal de "relativiser les faits".
"Son objectif était d'échanger avec le président", a-t-elle ajouté, reconnaissant un "geste particulièrement inadapté" venant d'un homme "lambda" "qui n'a jamais frappé quelqu'un". "Je pense qu'il a pris conscience de la gravité des faits".
Appelant le tribunal à ce qu'il n'y ait pas "de justice d'exception" ni de justice "pour l'exemple", elle a suggéré, en vain, des travaux d'intérêt général, car l'incarcération "ne l'amènera à rien".
"Cette décision sera observée, scrutée" et aura même "un écho médiatique international", avait pronostiqué M. Perrin, en référence aux nombreux journalistes massés au tribunal.
Relativiser le geste
La gifle infligée à Emmanuel Macron à Tain l'Hermitage avait suscité l'indignation de l'ensemble de la classe politique même si le président de la République a relativisé le geste, dénonçant des "faits isolés" commis par "des individus ultraviolents".
Emmanuel Macron a de nouveau minimisé cet épisode jeudi, estimant que le pays n'est pas dans une situation de tension comme pendant la crise des "gilets jaunes" et préférant insister sur l'ambiance d'"optimisme" qu'il sent en France.
"Il faut relativiser et ne rien banaliser" mais "ce n'est pas grave de recevoir une gifle quand on va vers une foule", a-t-il ajouté un entretien à la chaîne BFMTV.
(Avec AFP)